Cabinet de curiosités

En tant qu’étrangère dans une ville inconnue, l’architecture est devenue pour moi un langage à déchiffrer, un territoire d’indices. Chaque façade, chaque fenêtre entrouverte ou éclairée, s’est transformée en une boîte mystérieuse, un cabinet de curiosités silencieux. Non pas un musée figé, mais une scène vivante, fragile, où le quotidien se fige dans un instant de lumière.

Ces tableaux sont des portraits de façades, mais ce sont aussi des paysages intérieurs projetés vers l’extérieur. Derrière chaque vitre : une trace humaine, un objet illuminé, une sensation partagée à distance. Dans une fenêtre, j’ai vu une bulle de terre flottant dans un aquarium, suspendue comme une planète dans l’infime. Dans une autre, une hanoukkia — chandelier juif — m’est apparue comme un rappel incandescent de l’exil, de la mémoire et de la fête intime. Ces éléments deviennent des reliques contemporaines, chargées de signification dans leur banalité.

Les œuvres sont réalisées à l’huile sur toile, dans un format contenu, presque intime, comme un regard cadré par une fenêtre. Les compositions jouent sur les contrastes entre la rigidité des façades et l’inattendu du détail intérieur. Les couleurs, souvent sourdes ou nocturnes, plongent l’ensemble dans une atmosphère d’observation suspendue, entre réel et rêverie. ces œuvres questionnent notre rapport à l’autre, au dedans/dehors, au visible/invisible dans l’espace de la ville, au lieu de collectionner des objets exotiques venus d’ailleurs, je découvre des présences familières dans l’étrangeté du quotidien urbain.